Quelques jours avant l'été, il s'était retiré des réseaux sociaux... Aux chiottes son ordi, sa télé, son canapé et son neuf mètres carrés. Visant ainsi l'immensité - lui et lui seul face à la nature - il fit peau Neuve: vivre à fond pour cette vibrante promesse, sa liberté.
Adieu sa vie rectiligne transperçant de droites défaites au hasard. Finies l'amertume, la mégalopole des pierres froides au coeur crade. Au diable les sirènes de la nuit menées sur des chariots brancards. Majeur levé contre les regards vitreux, leurs rides en briques et façades.
Désormais, il n'était plus l'ombre de ce faux ami, de cette petite amie Ou de ce père exigeant des comptes... Il n'était l'ombre de personne, Lui qui avançait et dont les rêves avaient la peau dure, la pensée infinie. Un trou dans son ciel nuageux, il fallait que les oiseaux chantonnent…
Alors quand arriva l'été, il se trouva ce boulot, une aventure Hors les murs; pliant bagages comme on expédie un courrier, Courant à grandes enjambées, s'évadant de la mégastructure, Il s'engagea loin, très loin de chez lui, dans ce job saisonnier.
D'Halifax jusqu'en Colombie-Britannique, un voyage sans fin Qui l'emmena sur les zones de coupe aux lignes boueuses En tant que "tree planters": marcher, creuser à l'infinie faim, Des gestes répétés le long des forêts aux veines sinueuses.
Planter de jeunes arbres, reboiser après le passage des bûcherons Et des engins d'abattage tels de puissants chars d'assaut déboulant Sur un champ de bataille, puis s'activer de long en large sur les tronçons Où les véhicules menacent de déraper, de s'embourber à tout instant.
À ses mains égratignées, ses ongles incrustés de terre et de sang séché, Il était à deux doigts d'abandonner, chargé d'une trentaine de kilos de plantules. Mais chaque mouvement lui permettait de voir grandir son ombre sur d'éclatantes réalités: S'observer un peu plus vivant chaque jour, sentir ses cellules se renouveler au crépuscule.
Malgré l'effort demandé, les tendinites aux poignets, les piqûres d'insectes - Avec le soutien de la communauté dans la beauté sauvage des aires boréales - Il comprit que l'ombre qu'il a fallu caresser pour soigner ses maux les plus abjects Était là à participer avec lui, accompagnant chacun de ses pas. Un pas, un acte peu banal.
Franck (12/08/2019)
Les Tree Planters (planteurs d’arbres) exercent l’un des jobs saisonniers les plus durs au monde. Le Canada fait partie des nations qui exploitent le plus leurs forêts. En 2017, l’industrie forestière a rapporté vingt milliards d’euros à l’économie. Mais, depuis la fin des années 1960, sous la pression des mouvements écologistes, le gouvernement, qui possède 90 % des parcelles, pousse les compagnies d’exploitation forestière à replanter systématiquement. Ces planteurs d'arbres reboisent donc après le passage des bûcherons, qui œuvrent essentiellement dans les zones boréales de la Colombie-Britannique, de l’Alberta, de l’Ontario, du Québec et du Nouveau-Brunswick.
* A vous 3, Akim, Lacase, SienKieWicz Pour Lui & pour Eux Merci d'y avoir planté votre commentaire!
* Merci à VOUS, oui VOUS! Si seulement je pouvais convertir vos visites comme autant d'arbres à planter, cela nous ferait une bien belle forêt à sauver…
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