Il conviendrait de commencer par le jour premier, mais - et je m'en excuse auprès de mes lecteurs, s'ils existent - je n'en ai pas trouvé la force hier. Ou bien, je n'ai pas trouvé les mots. Mais les mots ne se cherchent ni ne se trouvent, ils sont là quand ils le veulent. S'il était nécessaire de faire un retour en arrière, de clarifier certains points avant de commencer, alors c'est maintenant que je le ferais. Mais je ne suis pas certain que cette mascarade soit de mise. Labourer la terre comme s'il en dépendait de sa vie, n'est-ce pas suffisant ? Bêcher, trancher à vif dans la terre fraîche, faire mal, jusqu'à fendre sa propre chair, cela ne suffit-il pas ? Creuser, creuser encore, quand il manque seulement quelques coups pour que le corps bascule, là, dans la brèche que l'on vient d'ouvrir, n'est-ce pas aussi puissant qu'un long récit d'une vie qui ne mérite ni qu'on la raconte, ni qu'on la termine ? Les deux mains appuyées contre la bêche, le dos suspendu au-dessus du sol, comme l'arcade d'un monument historique, le visage pâle sous les derniers rayons du soleil de printemps, les lèvres sèches, les yeux trempés de foudre, n'est-ce pas assez, assez ? Faut-il encore que je me raconte, que je me livre, que je m'aplatisse contre des feuilles blanches jusqu'à les noircir de cette vermine qui me ronge et m'apaise ? Quel Dieu en a décidé ainsi, quel astre se moque encore des foudres qu'il disperse, quelle pluie s'efforce encore et toujours à me baigner de sa colère, quel homme peut encore franchir des barbelés si bien tressés ? Suffira-t-il d'un geste pour que les orages se taisent ? Existe-t-il une ombre, au-delà des ténèbres, qui voudra bien me dire de quel bois je me chauffe, à quels horizons je peux bien me vouer quand ma vue devient trouble ? Existe-t-il une heure plus propice qu'une autre à l'abandon, à l'amour, à l'agonie ? Et ce soir, comment puis-je me nommer ? Rira-t-on de mes larmes si j'en fais des ivresses ? Laissez-moi vous dire combien l'amour est gauche, désarmant, lumineux, essentiel, blessant et mensonger. Non, ne le faites pas. Embrassez-moi. Couvrez-vous de sueur - il n'est pas nécessaire de courir pour rencontrer un mur. Livrez-vous comme je me livre, sans apparats, sans colère, sans éclats, sans espoirs. Faites-moi confiance et jamais l'on n'aura vu d'amour plus beau, plus sincère, plus entier. Ce n'est pas comme ça que la vie devient. Ce n'est pas comme ça que les hommes oublient. Comment, alors ? Combien de temps avant que la nuit ne finisse ? Et personne n'oublie, et la nuit ne finit pas. Avec la violence de l'échec vient l'échec.
Si les mots viennent quand ils veulent, je ne doute pas qu'ils adorent se précipiter jusqu'au bout de tes doigts. C'était rafraîchissant; ces pensées désordonnées qui veulent tout dire le temps d'une phrase, le temps d'une vie peut-être encore un peu plus. J'ai adoré, j'aurais voulu que ça ne finisse pas.
Âmemitié.
Personne n'a dit que la vie était facile. Juste qu'elle valait la peine d'être vécue.
Parfois je n'aime plus les mots, ils nous manipulent bien plus que nous le pensons. J'espère pour toi une petite éclaircie, pour reposer les blessures au moins !
Tous les textes hébergés par La
Passion des Poèmes sont protégés par les lois
de la protection des droits d'auteurs ainsi que par des traités
internationaux. Il est strictement interdit de distribuer, d'afficher
ou d'utiliser ces textes de quelque manière sans l'autorisation
de l'auteur du texte en question.