Je ne savais pas qu’elle aimait tant le cochon. Je ne la croyais pas. Je pensais que c’était une passion. Une fantaisie. Pour éviter l’ennui, le cauchemar du quotidien. Je pensais qu’elle m’aimait, et elle m’aimait vraiment. C’est ce qui me perd. Je voudrais la découper. L’ouvrir aux ciseaux et constater le désastre. M’emplir d’un vide qui l’a transformée en porc. Une truie aussi belle. Ça ne devrait pas exister. Parce que les cochons ont bouffé mon amour. Ce ne sont pas seulement. Pas seulement des cochons. Elle a choisi. Elle a changé c’est le vide. C’est son corps enfermé dans une histoire. Elle est seule à comprendre. Seule capitaine à bord. Maître du bateau qui fuit. Maîtresse perdue calme mais abandonnée. Flots de l’oubli parce que. Parce que c’est elle qui m’abandonne. Me laisse dans la colère. L’impuissance. Elle a raison peut-être. Le cochon c’est un territoire c’est un domaine. C’est un point de vue. Elle est là elle voit le monde. Cochon ouvert. Calme seule mais cochon ouvert. C’est ce qui compte. C’est ce qui compte maintenant. Les yeux d’un autre ne suffisent plus. Ça n’a jamais sauvé personne de toute façon. J’ai cru. Pouvoir me glisser à l’intérieur de son monde. M’infiltrer. Faire semblant. Ouvrir un cochon et aller comme les autres. Dedans comme elle. J’ai essayé. J’ai frappé la nuque d’un porc. J’ai fouillé moi aussi. J’ai cherché à comprendre. Le sang la chair. La peau dure les os épais. La carcasse pendue le cri du porc. L’intérieur. J’ai fouillé moi aussi j’ai cherché à savoir. Comprendre le mystère. J’ai cru. J’y ai cru. L’odeur, la saucisse, la moulinette. Je n’ai pas dit non.

et en plein milieu du texte j'ai cette toile de Soutine qui me vient à l esprit. Ce n est pas un cochon mais un bœuf mais ce n'est pas grave.

mh ça m'intéresse ça. comment s'appelle cette toile ?

Si tu n'as pas de réponse, c'est qu'il s'agit d'une toile filante!
En somme, dans le corps de chaque femme sommeille un cochon. ça rétablit l'équilibre.
J'ai aimé ces mots et ces expressions hachés.
Fiat Lux!

carcasse de boeuf (1925, il en a fait plusieurs qui portent ce nom)
elle a un sacré impact, plus que d autres, les couleurs et la dynamique sont vraiment fortes je trouve