Un couple de pigeons regarde dans le vague ils se foutent bien des miettes à côté de cette grosse femelle aux couleurs fades
je tourne les pages de mon livre, cherchant le passage où la petite Concetta a une forte envie de cracher sur cette autre jeune fille au visage merveilleux où elle voudrait bien réduire en poussière toute cette féminité et tuer Tancredi qui dévore des yeux la chair d'Angelica déjà couvert d'une fine couche de poussière blanche, pleine d'étoiles prometteuses
j'aimerais être un peu de ces trois personnages aussi belle que cette future putain aussi enragée que Concetta aussi amoureuse que Concetta aussi amoureux que Tancredi aussi détestable et ridicule que ces deux pigeons
je tourne les pages de mon livre, il y a le Prince et ses rêves et ses fièvres nocturnes qui baignent dans la puanteur des excréments cette chute au milieu des horizons connus, cette longue descente vers l'angoisse, ce petit tas d'ancêtres qui respire à sa place, les longues nuits, débordantes de chaleur humaine, passant, filant tout au fond de sa gorge, qui s'organisent en couches, en dépôts, en lits d'infortune et qui un jour viendront courber ses lèvres.
Je tourne les pages ne sont jamais blanches jamais brutalement noires toujours moites le poids du livre tord un peu mes mains
derrière la prochaine page l'ivresse délivre ses morts ses secrets ses peaux mon amour
je tourne les pages jamais blanches jamais brutalement noires toujours moites
sous ma main il y a des battements de cœur tranquilles et puissants et le malaise des pigeons devant la Seine éventrée.
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